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Episode 7 : un lieu digne de l'amour
La marquise Colchique de Plessis-Radasse rêvassait dans le lit de l'empereur. Elle établissait des plans, des stratégies.
Tout le monde savait sans le dire que l'impératrice Hazemnout et elle étaient amantes. Le couple savourait les bonnes nouvelles du jour.
- La marquise : C'est le moment de faire arrêter ton mari. La voie est libre pour nous !
- Hazemnout : L'Orchide est un fruit mûr qui ne demande qu'à être cueilli. Mais allons-y avec précaution ! Ce qui est sûr, c'est qu'il faut être sur place. Notre caravane est rassemblée et prête à partir pour l'Authiegane. Je me ferai proclamer souveraine dans peu de jours par toute une tripotée de généraux vainqueurs.
- Hazemnout : Yatoukiram ! Fais envoyer nos bagages au détachement de la Garde. Nous partons dès ce matin !
Catudila fêtait SA grande victoire. C'était le moment que Juskalos et Dame Latêtokaré avaient choisi pour mettre fin à la comédie.
- Juskalos : Seigneur Catudila, tu es en état d'arrestation. Un nouveau gouvernement est en place à Katapigone, tu n'es plus notre empereur !
- Catudila : Voilà une belle et grande surprise, général ! Ma femme et la marquise, n'est-ce pas ? Cette trahison te coûtera cher le moment venu.
Des gardes menacèrent Gason Authienoüs de l'arrêter aussi. Ses amis se regroupèrent autour de lui et firent front pour le protéger.
- Gason : Ne faites pas ça ! Quelles que soient ses erreurs, ceci est contraire au droit et à la justice !
- Dame Latêtokaré : Le droit et la justice, c'est nous à présent. Catudila est inapte à régner, il est déposé, voilà tout. Reste dans ton coin, cultive ton jardin, Gason, ou bien ton sort sera mêlé au tien, tout grand héros que tu sois !
- Gason : Tu as perdu la tête !!
- Catudila : Comme ça elle la perdra deux fois : aujourd'hui et plus tard, quand j'aurai repris les choses en main !
- Dame Latêtokaré : Emmenez-le à la villa qu'il aime tant !
- Catudila : Ma chère tante a le souci de mon bien-être ! Je me fais fort de m'occuper bientôt du tien et de celui de ton absurde crétin de fils !
- Juskalos : Reste en dehors de ça, Seigneur Gason, je t'en prie. Tu répètes assez que tu veux fuir la politique. Mets-toi donc en retrait et laisse-nous faire. Tu nous rejoindras quand tu réaliseras le bien qui ressortira de tout ceci.
Derrière Gason, il se produisit une chose horrible. Une araignée tapie dans le sable et dérangée par le piétinement des mini-gens bondit sur Kalendos et le mordit cruellement au cou.
la bête affolée sauta ensuite sur un des hommes de la garde personnelle de Catudila, qui s'effondra à son tour, mourant.
Accablés, Gason Authienoüs, Tibias, Chantalladçouss et Philêminion soutinrent leur ami de 30 ans quand il rendit son dernier soupir. L'un des plus vieux compagnons d'aventure de Gason, l'ami indéfectible, n'était plus. Ce drame fit diversion et l'on emmena Catudila et ses proches sans qu'aucune résistance ne vint contrarier les plans des conspirateurs.
On marcha donc vers les hauteurs, vers la villa.
Gason Authienoüs se résigna à se mettre en retrait, comme on lui avait dit. Il dressa un campement de fortune avec l'aide de Korydon et Encolpe. Les deux garçons avaient toujours leurs entrées dans la villa, et surtout leurs sorties, malgré la nouvelle situation. Ils serviraient d'espions.
Dès le lendemain, Korydon monta à la villa pour prendre la température. Ce fut d'abord celle de l'eau de la piscine dans laquelle il trouva un Catudila calme et pensif. Le prisonnier invita affectueusement son amant à le rejoindre.
Korydon avait une raison très personnelle de continuer à retrouver son maître dans son intimité. Catudila était trahi, presque seul. Avait-il enfin besoin des autres ? Le jeune homme se retrouvait en pleine politique et il était curieux de voir comment le prisonnier allait rebondir. En attendant, celui-ci paraissait étrangement détendu.
- Catudila : Es-tu bien, Korydon ? Moi oui, à ma grande surprise. Quelle bonne idée ces crétins ont eue de m'arrêter !
- Hilvaotafantong : Votre Majesté, pour le dîner nous avons reçu une huître et un escargot. Que préférez-vous ?
- Catudila : Et pourquoi pas les deux ? De toute façon il y aura là de quoi nourrir toute la maisonnée pendant une semaine.
- L'officier Lafotaki : Il t'es interdit, Seigneur, de t'éloigner de ce point.
- Catudila : C'est donc à ce point ultime que je m'arrêterai, comme un défi, pour jouir de ma liberté très clôturée. J'appellerai ce point : le Bout du Monde ! Ce monde-là me suffit bien pour le moment.
- Lafotaki : Seigneur...
- Catudila : Et parvenu au bout du monde après avoir l'immense effort d'une quinzaine de pas, je veux fêter cette victoire ! Je veux boire, manger et baiser, car il faut bien qu'on vive, il faut bien qu'on boive, il faut bien qu'on aime, il faut bien qu'on meure ! Mon cher petit Encolpe, va me faire la grâce de jouer au docteur avec mon médecin personnel ! Le pauvre bave d'envie depuis des jours sur ton délicieux corps sec et musclé de garçon nomade du désert qui ne ménage pas sa peine et se nourrit sainement ! Pendant ce temps, je me soucierai enfin du plaisir que je peux donner à mon Korydon !
- Lafotaki : Seigneur...
- Catudila : Tu ne sais dire que ça ? Va-t-en faire ton rapport et laisse-nous vaquer aux nôtres !
- Korydon : Je suis à toi, Seigneur.
- Catudila : Par pitié, Korydon, cesse de me balancer du "Seigneur", appelle-moi par mon nom ! Oui, tu es là parce que je l'ai voulu quand j'étais empereur. Mais maintenant que je ne suis plus rien au bout du monde ?
- Korydon : J'y suis parce que je l'ai voulu aussi... Seigneur Catudila.
- Catudila : Ne t'attends pas de ma part à des remerciements ou à une moue de reconnaissance puérile.
- Korydon : Je vois bien que tu ne comprends pas pourquoi je suis là. Moi non plus. On comprendra plus tard.
- Catudila : Aah ! Que c'est bon de jouir enfin, emporté par des bras audacieux !
Comme le soir de leur arrivée à Cashprix, au château des Argousiers, ils mangèrent seul à seul.
- Catudila : Tu es le seul à être resté volontairement auprès de moi dans cette prison. M'aimes-tu, Korydon ?
- Korydon : Non, Seigneur. J'aime te servir, être auprès de toi, j'aime imaginer que je t'apporte quelque chose, j'aime voir en toi la face cachée qui n'est pas celle du souverain fou, criminel et débauché qui t'a conduite ici... Je suis comme... fasciné. Je crois que t'aimer vraiment pourrait me détruire...
- Catudila : C'est vrai, j'aurais plaisir à te détruire si tu m'aimais, tout le monde le sait. Brave et honnête jeune homme du peuple, si franc et naturel ! C'est la première fois que je ressens le besoin d'ouvrir toutes les portes de mon intimité à un autre être, même sans retour. Non, ta destruction viendra d'ailleurs que de moi. Et à ce propos, quand je te l'ordonnerai, tu t'enfuiras de cette villa.
- Korydon : Pourquoi ? Tu crains pour ta vie ? Tu penses que Dame Latêtokaré et cette ordure de général veulent te tuer, nous tuer tous ?
- Catudila : Silence, Garçon. Tu feras ce que je te dirai le moment venu. Pour ton bien. En attendant, jouissons calmement des plaisirs de la vie dans ce lieu si bien fait pour ça. Un lieu digne de l'amour. Nous sommes en cage mais qu'aurions-nous de meilleur à espérer au dehors ? Pour une fois que je me sens détendu et heureux quelque part, ne gâche pas tout avec des doutes et de la prospective. Faisons plutôt comme si tu me désirais aussi, là, maintenant... Tu es magnifique de sensualité. La pureté existe même si elle ne repose pas sur des dogmes et des pratiques conventionnels. Une forme de pureté. Au lieu de l'admirer, au lieu de t'admirer et de vouloir t'étudier comme une nouvelle espèce vivante, je devrais t'en vouloir mortellement de m'avoir rendu prisonnier et dépendant de ton corps, de toi tout entier... Il y aura au moins eu ça dans ma vie.
- Korydon : Parle moins, Seigneur, et désire-moi.
A SUIVRE...
DANS L'EPISODE 8 CI-DESSOUS
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